Choisir son pays de résidence fiscale n’est pas qu’une question d’impôts : c’est un acte stratégique qui engage la fiscalité, l’affiliation sociale, la qualité de vie et la stabilité à long terme.
Analyse complète du choix d’un pays de résidence fiscale : critères essentiels, enjeux fiscaux, qualité de vie, stabilité et mobilité internationale.
Le sujet vulgarisé
Imagine qu’Alice, 30 ans, travaille comme freelance numérique. Elle vit en France aujourd’hui mais se demande si elle pourrait s’installer dans un autre pays pour payer moins d’impôts, profiter d’un cadre de vie différent et continuer à exercer son activité. Le pays de « résidence fiscale » est l’État où une personne est considérée pour l’imposition sur ses revenus mondiaux. Cela dépend de plusieurs critères : combien de jours elle y passe, si elle y a son « foyer » (famille, logement), si c’est là que se trouvent ses intérêts économiques. En France, par exemple, on est résident fiscal si on séjourne plus de 183 jours, ou si on a son centre d’intérêts économiques dans l’Hexagone. Si Alice choisit un autre pays, elle doit analyser plusieurs points : le taux d’imposition des revenus, l’existence d’un régime spécial pour les nouveaux résidents, la stabilité politique et économique du pays, le coût de la vie, les infrastructures, et bien sûr les règles sociales (santé, retraite). Certains pays européens ont mis en place des statuts fiscaux attractifs : par exemple, le régime de résident non-habitué au Portugal permet à certains expatriés d’être imposés au taux réduit pendant dix ans. En choisissant intelligemment son pays de résidence fiscale, Alice peut optimiser sa charge fiscale, tout en veillant à ne pas perdre ses droits sociaux ou tomber dans une situation ambiguë. C’est un arbitrage entre la liberté et la prévoyance : ce choix engage sa vie professionnelle, personnelle et fiscale.
En résumé
Le pays de résidence fiscale détermine l’État qui impose vos revenus mondiaux. Le choix de ce pays repose sur des critères légaux (durée de séjour, centre des intérêts économiques, foyer), mais aussi sur des facteurs stratégiques : taux d’imposition, stabilité politique, protection sociale et qualité de vie. Bien choisir permet d’optimiser fiscalement sa mobilité internationale, mais une mauvaise anticipation expose à des obligations inattendues et des risques. Il s’agit donc d’un équilibre entre fiscalité, vie quotidienne et sécurité juridique dans un contexte globalisé où la mobilité est plus que jamais un atout.
Plan de l’article
- Le cadre juridique de la résidence fiscale
- Les critères internes de détermination dans les États-membres
- Les conventions fiscales internationales et les conflits de résidence
- Le choix fiscal : taux, abattements, statuts spéciaux
- La stabilité politique et économique comme facteur de choix
- La qualité de vie, les infrastructures et l’environnement humain
- Les obligations sociales et les systèmes de protection dans le pays choisi
- Études de cas : profils de résidents, comparaisons chiffrées
- Les pièges à éviter et les erreurs fréquentes
- Une grille de décision pour choisir votre pays de résidence fiscale
- Vers une mobilité internationale durable : perspectives et évolutions
1. Le cadre juridique de la résidence fiscale
La notion de résidence fiscale constitue le fondement de toute imposition sur le revenu. Elle définit l’État auquel un individu est rattaché pour le calcul de son impôt mondial. Chaque pays possède ses propres règles internes, mais des principes communs existent à travers les conventions internationales.
Un concept central en droit fiscal international
Le principe de base est simple : un individu est imposable dans le pays où il réside de façon stable et durable. Cette résidence détermine le droit de cet État à taxer l’ensemble de ses revenus, même ceux perçus à l’étranger.
Dans la majorité des pays, le critère le plus utilisé est celui de la durée de séjour : plus de 183 jours sur une année civile. Ce seuil, issu du modèle de convention de l’OCDE, sert de référence mondiale.
Mais d’autres critères peuvent entrer en jeu :
- le centre des intérêts économiques (lieu où la personne tire la majorité de ses revenus ou possède ses investissements principaux) ;
- le foyer permanent d’habitation (logement principal ou familial) ;
- le centre des intérêts vitaux, notion plus subjective regroupant les attaches personnelles, familiales et sociales.
Ces critères sont souvent cumulatifs. Si plusieurs pays peuvent revendiquer la résidence fiscale d’un même individu, une convention bilatérale tranche le conflit.
Un ancrage légal dans chaque système national
En France, la résidence fiscale est définie à l’article 4 B du Code général des impôts. Le contribuable est considéré comme résident dès lors qu’il remplit l’un des trois critères : foyer ou lieu de séjour principal en France, activité professionnelle principale en France, ou centre des intérêts économiques dans le pays.
L’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie appliquent des règles proches, avec quelques variantes : l’Allemagne retient la notion de domicile permanent, tandis que l’Espagne se base sur la présence physique et l’existence de liens économiques substantiels.
Dans les pays anglo-saxons, la logique est identique mais plus codifiée. Le Royaume-Uni applique un Statut de Résidence Statutaire (Statutory Residence Test), combinant durée de présence, liens familiaux et patrimoine. Les États-Unis, quant à eux, utilisent un test de “substantial presence”, basé sur le nombre de jours cumulés sur trois ans.
Une base pour la fiscalité mondiale
Être résident fiscal d’un pays signifie que celui-ci a le droit de taxer vos revenus mondiaux. C’est une différence majeure avec le statut de non-résident, qui ne subit l’impôt que sur ses revenus de source locale.
Cette distinction détermine également les obligations déclaratives : en France, par exemple, un résident doit déclarer ses comptes bancaires à l’étranger (formulaire 3916), alors qu’un non-résident n’y est pas soumis.
La résidence fiscale est donc bien plus qu’un critère administratif : c’est une clé d’accès à la fiscalité internationale, conditionnant à la fois la taxation, les avantages fiscaux et les conventions de protection contre la double imposition.
2. Les critères internes de détermination dans les États membres
Déterminer la résidence fiscale d’un individu n’est pas toujours simple. Chaque État fixe ses propres critères, et leur application dépend souvent de la combinaison de plusieurs éléments : durée de présence, attaches personnelles, activité professionnelle ou encore patrimoine. Comprendre ces critères permet d’éviter les erreurs d’interprétation, sources fréquentes de redressements fiscaux.
Les critères de durée de séjour et de présence physique
Le critère des 183 jours constitue le repère le plus connu. Il signifie qu’une personne est réputée résidente fiscale d’un pays si elle y passe plus de la moitié de l’année.
Mais certains États appliquent des variantes :
- Espagne : la résidence est reconnue dès 183 jours de présence effective, mais aussi si la personne a son conjoint ou ses enfants dépendants sur le territoire.
- Italie : la résidence est établie si la personne est inscrite au registre de la population résidente pendant plus de 183 jours, même sans preuve physique de présence.
- France : le critère du séjour principal s’applique dès que la personne réside plus de six mois sur le territoire, avec ou sans continuité.
Ce seuil est clair mais trompeur : passer moins de 183 jours dans un pays ne garantit pas d’échapper à la résidence fiscale si d’autres critères sont remplis.
Le centre des intérêts économiques et personnels
Le second critère, souvent déterminant, est celui du centre des intérêts économiques. Il s’agit du pays dans lequel l’individu tire la majeure partie de ses revenus, possède son entreprise, ses placements financiers ou son bien immobilier principal.
Ainsi, un entrepreneur français domicilié à Dubaï mais dirigeant sa société depuis Paris risque d’être considéré comme résident fiscal français. Ce principe, consacré par la jurisprudence du Conseil d’État, vise à éviter les domiciles fictifs ou les montages purement déclaratifs.
Le centre des intérêts vitaux complète cette approche en tenant compte des attaches familiales et sociales : lieu où vit la famille, scolarisation des enfants, vie associative, cercle relationnel. Ces éléments, bien que non quantifiables, pèsent fortement dans la décision des administrations fiscales.
Les critères de droit interne spécifiques
Chaque pays conserve des particularités :
- Royaume-Uni : le Statutory Residence Test évalue la résidence selon trois seuils : nombre de jours de présence, liens familiaux et durée des séjours précédents. Moins de 46 jours peut suffire à conserver la non-résidence pour un expatrié.
- Portugal : une présence supérieure à 183 jours ou la possession d’un logement permanent suffit à établir la résidence. Ce critère ouvre aussi l’accès au régime fiscal des Résidents Non-Habituels (RNH).
- Suisse : la résidence dépend du lieu où se trouve le centre des relations personnelles. Les cantons appliquent ensuite leur propre taux d’imposition, parfois très différencié (de 10 % à plus de 30 %).
- Malte : la résidence est présumée si la personne séjourne plus de 183 jours, mais l’imposition ne s’applique que sur les revenus rapatriés dans le pays.
Les preuves à fournir et la charge de la démonstration
Les administrations fiscales exigent souvent des éléments matériels : contrats de location, factures d’énergie, titres de propriété, billets d’avion ou relevés bancaires.
Le contribuable doit démontrer la cohérence entre sa vie effective et son statut fiscal déclaré. En cas de contradiction — résidence déclarée à l’étranger mais activité constante dans le pays d’origine — les autorités peuvent requalifier la résidence et réclamer les impôts dus avec pénalités.
Les critères internes sont donc le socle de toute détermination fiscale, mais leur interprétation reste casuistique : elle dépend du mode de vie, du degré de mobilité et de la capacité à justifier son ancrage réel.
3. Les conventions fiscales internationales et les conflits de résidence
Même avec des critères nationaux clairs, un individu peut être considéré comme résident fiscal de deux pays simultanément. Ce cas, appelé conflit de résidence, est fréquent chez les expatriés, les travailleurs frontaliers ou les nomades numériques. Pour éviter la double imposition, les États ont conclu des conventions fiscales internationales fondées sur le modèle de l’OCDE.
Le rôle et la logique des conventions fiscales
Une convention fiscale bilatérale fixe les règles permettant de déterminer quel État a le droit d’imposer les revenus. Elle répartit la compétence fiscale entre le pays de résidence et celui de la source des revenus.
Ces accords visent deux objectifs :
- Éviter la double imposition d’un même revenu.
- Prévenir la fraude ou l’évasion fiscale par transfert artificiel de résidence.
La plupart des États membres de l’Union européenne ont signé plus de 90 conventions fiscales bilatérales. Par exemple, la France en compte 122 en vigueur en 2025, couvrant pratiquement tous les continents.
Le mécanisme de résolution des doubles résidences
Lorsqu’un individu est considéré comme résident par deux pays, la convention applique une série de critères hiérarchiques :
- Foyer d’habitation permanent : la résidence est attribuée au pays où la personne dispose d’un logement stable.
- Centre des intérêts vitaux : à défaut, le pays où se trouvent les attaches personnelles et économiques les plus fortes.
- Lieu de séjour habituel : si les deux précédents sont indéterminés, la résidence revient au pays où la personne séjourne le plus souvent.
- Nationalité : en dernier recours, la résidence est attribuée au pays dont la personne est citoyenne.
- Procédure amiable : si le conflit persiste, les administrations fiscales concernées peuvent ouvrir une négociation bilatérale pour trancher le cas.
Ce système, bien que logique, suppose une bonne documentation personnelle. Un contribuable doit pouvoir prouver la localisation de ses attaches, de ses comptes et de son activité.
Les conventions et la répartition du droit d’imposer
Les conventions fiscales définissent aussi quel pays a le droit de taxer chaque type de revenu :
- Salaires : imposables dans le pays d’exercice de l’activité, sauf détachement de courte durée.
- Revenus immobiliers : imposables dans le pays où le bien est situé.
- Dividendes et intérêts : souvent partagés entre le pays de la source et celui de la résidence, avec un plafonnement du taux de retenue à la source (souvent 15 %).
- Pensions de retraite : selon les accords, imposables soit dans le pays de versement, soit dans celui de résidence.
Par exemple, un Français retraité au Portugal est imposé sur sa pension selon la convention franco-portugaise. Le Portugal, dans le cadre du régime RNH, peut accorder une exonération d’impôt pendant dix ans sur certains revenus étrangers, ce qui attire de nombreux expatriés européens.
Les limites et les zones d’incertitude
Malgré leur portée, les conventions fiscales ne couvrent pas tous les cas modernes. Les activités numériques, le télétravail transfrontalier ou les revenus issus de plateformes internationales (freelance, streaming, consulting) échappent parfois à la logique territoriale des conventions.
Un nomade numérique travaillant pour une entreprise américaine tout en vivant à Bali ou à Lisbonne peut ne dépendre d’aucun système clairement défini, créant un risque de double non-imposition ou d’incertitude juridique.
De plus, certaines conventions anciennes ne prévoient pas les réalités économiques contemporaines, comme les crypto-actifs ou les revenus dématérialisés. L’OCDE travaille depuis 2022 sur des recommandations de révision, notamment via le Pillar Two Framework sur la fiscalité internationale minimale.
Une sécurité juridique inégale
Les conventions fiscales constituent un filet protecteur, mais leur application dépend de la bonne volonté administrative des États. Les délais de traitement, souvent supérieurs à 12 mois, la complexité des formulaires et les divergences d’interprétation rendent ces dispositifs parfois peu accessibles aux particuliers.
Pour les contribuables mobiles, s’appuyer sur un conseil fiscal international reste essentiel pour éviter les erreurs de déclaration et anticiper les risques de requalification.
4. Le choix fiscal : taux, abattements, statuts spéciaux
Choisir son pays de résidence fiscale ne se résume pas à fuir l’impôt. Il s’agit d’un arbitrage stratégique entre niveau de taxation, sécurité juridique et attractivité du régime. L’Europe et le reste du monde proposent une grande diversité de systèmes, allant de la fiscalité progressive classique à des régimes territoriaux ou incitatifs destinés aux nouveaux résidents.
Des niveaux d’imposition très contrastés
Les écarts entre pays européens sont considérables. En 2024, selon l’OCDE :
- le taux marginal d’imposition atteint 55,8 % au Danemark, 49 % en France et 47 % en Belgique ;
- il descend à 20 % en Bulgarie et 10 % en Hongrie ;
- la moyenne de l’UE s’établit autour de 37 %.
Ces chiffres ne suffisent pas à déterminer le pays idéal. Certains États à faible taux compensent par des cotisations sociales élevées, tandis que d’autres appliquent des taxes locales ou des impôts indirects (TVA, taxe foncière) plus lourds.
Par exemple, un salarié percevant 80 000 € annuels paiera environ 36 000 € d’impôt total en France, 30 000 € en Allemagne et 18 000 € en Irlande.
Les régimes fiscaux spéciaux pour les nouveaux résidents
De nombreux pays ont mis en place des régimes d’attractivité fiscale destinés aux étrangers qualifiés, investisseurs ou retraités. Ces dispositifs permettent de réduire l’impôt sur le revenu pendant une période donnée, souvent 5 à 10 ans.
Quelques exemples notables :
- Portugal – Résident Non Habituel (RNH) : imposition à 20 % sur les revenus locaux et exonération sur certaines pensions étrangères pendant dix ans.
- Italie – Regime dei nuovi residenti : taxe forfaitaire annuelle de 100 000 €, couvrant tous les revenus de source étrangère.
- Grèce – Programme des nouveaux résidents : imposition à 7 % sur les pensions et revenus étrangers pendant dix ans.
- Espagne – Loi Beckham : imposition à 24 % sur les revenus espagnols, exonération des revenus étrangers pendant six ans.
- Chypre et Malte : taux forfaitaires bas et absence d’imposition sur les revenus non rapatriés.
Ces régimes, bien que séduisants, comportent des conditions strictes : durée de résidence minimale, absence de statut fiscal antérieur dans le pays, ou investissements locaux obligatoires.
Les abattements et incitations sectorielles
Certains pays favorisent fiscalement les professions libérales, travailleurs indépendants ou investisseurs étrangers.
- L’Irlande propose une exonération partielle sur les revenus issus de l’innovation et du numérique.
- Les Pays-Bas accordent le “30 % ruling”, une exonération de 30 % du salaire brut pour les travailleurs étrangers hautement qualifiés pendant 5 ans.
- La France offre un régime des impatriés, réduisant l’imposition sur la prime d’expatriation et exonérant partiellement les revenus étrangers pendant 8 ans.
Ces incitations traduisent une concurrence fiscale assumée au sein de l’Union, malgré les efforts d’harmonisation de la Commission européenne.
La fiscalité du patrimoine et des entreprises personnelles
Outre l’impôt sur le revenu, la taxation du patrimoine ou de l’activité indépendante influence fortement le choix du pays.
- La France maintient un impôt sur la fortune immobilière (IFI) à partir de 1,3 million €.
- L’Espagne applique un impôt similaire dans plusieurs régions, jusqu’à 3,5 %.
- La Suisse taxe la fortune dès 50 000 CHF dans certains cantons, mais avec des taux très faibles (0,3 à 1 %).
- D’autres pays, comme le Royaume-Uni, ne prélèvent aucun impôt sur la fortune, mais imposent les successions au-delà de 325 000 £ à un taux de 40 %.
Pour les entrepreneurs individuels, la fiscalité sur les bénéfices et dividendes varie de 9 % en Hongrie à 33 % en France. Certains pays (Irlande, Estonie) ont supprimé l’imposition des bénéfices non distribués, favorisant la rétention du capital dans l’entreprise.
Un choix d’équilibre entre fiscalité et stabilité
Les pays à fiscalité faible ne garantissent pas toujours la sécurité juridique ou la stabilité économique. À l’inverse, des États à taxation élevée offrent souvent une meilleure protection sociale, une administration fiable et un réseau d’accords internationaux étendu.
Pour un contribuable mobile, le choix du pays fiscal doit combiner taux d’imposition compétitif, sécurité des actifs, et prévisibilité réglementaire. Une fiscalité attractive n’a d’intérêt que si elle s’inscrit dans un environnement stable, transparent et durable.
5. La stabilité politique et économique comme facteur de choix
Un pays fiscalement avantageux ne suffit pas : il doit aussi être stable. La fiscalité, la sécurité juridique et la valeur des actifs dépendent directement de la situation politique et économique. Pour un contribuable mobile, ce critère est aussi déterminant que le taux d’imposition.
L’importance de la sécurité juridique et institutionnelle
La stabilité d’un État repose d’abord sur la prévisibilité de son cadre légal. Un régime fiscal attractif perd tout intérêt s’il peut être modifié du jour au lendemain.
Les pays d’Europe du Nord — Danemark, Suède, Finlande — sont réputés pour la fiabilité de leurs institutions : les lois fiscales y évoluent lentement et après consultation publique. À l’inverse, certains États ayant misé sur des régimes spéciaux ont procédé à des changements soudains, comme le Portugal qui a restreint en 2024 les avantages du statut RNH.
La sécurité juridique se mesure aussi à la clarté de l’administration et à la qualité de la justice. Un système judiciaire lent ou imprévisible fragilise la confiance des résidents étrangers, même si les taux d’imposition restent faibles.
La stabilité macroéconomique et la politique budgétaire
Un pays fiscalement attractif mais économiquement instable présente des risques à moyen terme : inflation, dépréciation monétaire, hausse brutale des taxes.
Les États de la zone euro offrent une protection monétaire solide, alors que certains pays à fiscalité basse (Hongrie, Bulgarie) connaissent des fluctuations plus fortes.
L’indicateur de confiance économique publié par la Commission européenne classe en 2024 :
- l’Irlande et les Pays-Bas parmi les plus stables ;
- la Grèce et la Croatie dans la moyenne ;
- la Roumanie et la Hongrie parmi les plus exposées aux variations budgétaires.
Un contribuable qui envisage une installation durable doit donc examiner la dette publique, l’évolution du PIB, la stabilité de la monnaie et la notation souveraine du pays. Ces paramètres déterminent la pérennité du régime fiscal choisi.
Le cadre politique et la perception du risque
La fiscalité dépend aussi du climat politique. Les périodes électorales ou les alternances rapides entraînent souvent des réformes fiscales.
La France, par exemple, a modifié à plusieurs reprises la fiscalité du capital et des revenus en moins de dix ans. À l’inverse, l’Irlande et les Émirats arabes unis offrent un cadre fiscal inchangé depuis plus de quinze ans, gage de prévisibilité pour les investisseurs étrangers.
Les pays où la démocratie est consolidée, la corruption faible et l’administration transparente sont généralement considérés comme zones de confiance fiscale. Selon l’indice de perception de la corruption de Transparency International (2024) :
- le Danemark, la Finlande et la Suède se situent dans le top 5 mondial ;
- la France est 21ᵉ ;
- la Grèce et la Hongrie dépassent le 60ᵉ rang.
Ces écarts influencent la réputation d’un pays auprès des résidents fortunés et des entreprises internationales.
Le rôle des accords internationaux et de la diplomatie
La stabilité d’un régime fiscal dépend enfin de ses relations diplomatiques. Les États disposant d’un vaste réseau de conventions de non-double imposition offrent une meilleure sécurité aux expatriés.
Un pays isolé ou sujet à des sanctions peut voir ses flux financiers restreints. C’est notamment le cas de certaines juridictions à faible fiscalité, soumises à la liste noire de l’Union européenne.
À l’inverse, des pays comme la Suisse, les Émirats arabes unis ou Singapour combinent une fiscalité compétitive et une diplomatie fiscale active, garantissant aux résidents la libre circulation de leurs capitaux.
Un équilibre entre avantage fiscal et stabilité globale
Le choix d’un pays de résidence fiscale doit donc s’appuyer sur une vision de long terme. Une économie dynamique, une gouvernance stable et une administration prévisible comptent autant que les taux d’imposition.
La fiscalité ne peut être dissociée de la stabilité institutionnelle : sans confiance dans la pérennité du système, les avantages fiscaux se transforment vite en incertitude.
6. La qualité de vie, les infrastructures et l’environnement humain
Choisir un pays de résidence fiscale ne se limite pas à des calculs comptables. Ce choix détermine aussi le cadre de vie quotidien : sécurité, accès aux soins, éducation, transports, culture et environnement. La fiscalité doit donc être mise en perspective avec la qualité de vie réelle que le pays offre à ses résidents.
La qualité de vie comme facteur d’attractivité
De nombreux contribuables fortunés ou travailleurs indépendants privilégient désormais des pays offrant un équilibre entre fiscalité modérée et haut niveau de confort.
Les classements internationaux — tels que le Quality of Living Index de Mercer ou l’indice Numbeo 2024 — montrent une constante : les pays nordiques, la Suisse et certains États d’Europe du Sud dominent les premières places.
Par exemple :
- Zurich, Copenhague et Vienne se classent parmi les villes les plus agréables d’Europe.
- Lisbonne et Malaga séduisent par leur climat, leur sécurité et leur coût de la vie maîtrisé.
- Tallinn ou Prague attirent les travailleurs du numérique grâce à une excellente connectivité et des coûts modérés.
Un régime fiscal attractif peut perdre son intérêt si le cadre de vie est dégradé. À l’inverse, des pays à imposition moyenne — comme les Pays-Bas ou l’Allemagne — compensent par des infrastructures de qualité, une administration efficace et une stabilité sociale solide.
Le rôle des infrastructures et des services publics
Les infrastructures déterminent la qualité d’installation et de mobilité.
Les pays d’Europe de l’Ouest disposent de réseaux de transport performants, d’une couverture médicale universelle et de systèmes éducatifs reconnus.
À titre de comparaison :
- un abonnement de transport en commun coûte en moyenne 60 € par mois en Allemagne contre 35 € en Espagne, mais la ponctualité et la fréquence sont supérieures dans le premier cas ;
- les dépenses de santé par habitant atteignent 6 200 € en France et 5 700 € en Allemagne, garantissant un niveau de soins très élevé.
Ces investissements se traduisent par une meilleure espérance de vie, un environnement plus sûr et une administration plus prévisible — trois éléments souvent cités par les expatriés comme prioritaires.
Le coût de la vie et la cohérence globale
Un pays à fiscalité faible peut présenter un coût de la vie élevé qui annule les gains fiscaux.
Exemples concrets :
- En Suisse, un appartement de 80 m² à Zurich coûte environ 3 000 € par mois, avec des assurances santé obligatoires dépassant 500 € mensuels.
- À Lisbonne, le coût est moitié moindre, mais les revenus moyens y sont également plus faibles.
- À Dubaï, l’absence d’impôt sur le revenu est compensée par un coût de logement et de scolarité très élevé (jusqu’à 20 000 € par an pour une école internationale).
Les expatriés doivent donc raisonner en pouvoir d’achat net : un taux d’imposition plus bas ne garantit pas un meilleur niveau de vie si les dépenses quotidiennes explosent.
L’environnement humain et la facilité d’intégration
La réussite d’un changement de résidence dépend aussi de l’accueil et de l’adaptation culturelle.
Les pays anglophones (Irlande, Malte, Pays-Bas) offrent une barrière linguistique limitée et une forte communauté internationale. À l’inverse, certaines destinations fiscalement attractives comme la Bulgarie ou la Hongrie présentent des obstacles administratifs et linguistiques notables.
La qualité du tissu social, la sécurité et le respect de la diversité comptent dans le sentiment d’appartenance.
Selon le Global Peace Index 2024, l’Islande, le Danemark et le Portugal figurent parmi les pays les plus sûrs du monde, un critère essentiel pour les familles et retraités.
Fiscalité et qualité de vie : une combinaison stratégique
Le choix d’un pays fiscalement attractif mais instable socialement, mal desservi ou administrativement lourd conduit souvent à des désillusions.
Une résidence fiscale réussie conjugue :
- un cadre de vie sain et sécurisé ;
- une fiscalité claire et soutenable ;
- un environnement favorable à la santé, à l’éducation et à la culture ;
- une stabilité institutionnelle garantissant la pérennité du système.
C’est cette combinaison entre efficacité fiscale et qualité de vie qui distingue les destinations réellement attractives de celles qui ne le sont qu’en apparence.
7. Les obligations sociales et les systèmes de protection dans le pays choisi
Choisir un pays de résidence fiscale implique aussi de s’inscrire dans un système social. Les cotisations, la couverture santé, la retraite ou la protection chômage varient considérablement d’un État à l’autre. Ces éléments influencent non seulement le coût global de la résidence, mais aussi la sécurité à long terme.
Les cotisations sociales : une charge souvent sous-estimée
La fiscalité sur le revenu n’est qu’une partie de la charge réelle. Les cotisations sociales peuvent représenter jusqu’à 40 % du salaire brut dans certains pays européens.
Quelques comparaisons en 2024 :
- France : environ 45 % du salaire brut (employeur et salarié confondus) pour une couverture complète.
- Allemagne : 39 %, répartis à parts égales entre employeur et salarié.
- Portugal : 34,75 % (23,75 % employeur, 11 % salarié).
- Hongrie : 13 % pour l’employeur, 18,5 % pour le salarié.
- Irlande : 14,75 % au total, avec des plafonds plus faibles.
Ces chiffres montrent qu’un pays à faible imposition peut compenser cette différence par des cotisations élevées, et inversement. Le coût global doit donc être évalué en prélèvements combinés : impôt + sécurité sociale.
Les régimes de santé et de retraite
Les modèles de protection sociale se répartissent en deux grandes catégories :
- Modèles universels financés par l’impôt (Royaume-Uni, Danemark, Suède) : les soins sont gratuits ou peu coûteux, mais les prélèvements fiscaux sont élevés.
- Modèles contributifs (France, Allemagne, Italie) : les prestations dépendent des cotisations versées, avec un lien direct entre revenu et protection.
Un expatrié qui choisit de s’établir durablement doit vérifier :
- la qualité des soins et la rapidité d’accès au système public ;
- la possibilité d’adhérer à une assurance privée complémentaire ;
- les accords bilatéraux de transfert de droits entre pays (santé, retraite).
Par exemple, le règlement européen (CE) 883/2004 permet à un citoyen de cumuler ses périodes de cotisation dans plusieurs pays de l’UE pour le calcul de la pension. En revanche, hors Europe, ces mécanismes dépendent des conventions bilatérales, souvent limitées.
La portabilité des droits sociaux pour les expatriés
Un travailleur mobile doit anticiper la continuité de ses droits sociaux : retraite, assurance maladie, chômage.
L’Union européenne a mis en place le formulaire U1 pour transférer les périodes d’emploi entre États membres et le formulaire S1 pour bénéficier des soins à l’étranger.
Cependant, pour les résidents hors UE, comme aux Émirats arabes unis ou en Thaïlande, il n’existe souvent aucune portabilité : les cotisations locales ne donnent pas de droits dans le pays d’origine.
Les expatriés optent alors pour des contrats d’assurance santé internationale, dont le coût varie selon l’âge et la couverture (de 150 € à 800 € par mois). Ces contrats assurent une protection mondiale, mais ils ne remplacent pas les droits à la retraite ou au chômage.
La protection sociale des indépendants et nomades numériques
Les travailleurs indépendants ou nomades numériques doivent souvent gérer eux-mêmes leur protection.
Certains pays proposent des régimes simplifiés :
- Portugal : cotisation minimale de 21,4 % sur le revenu réel.
- Estonie : régime numérique avec déclaration automatisée et cotisations plafonnées.
- France : système micro-social (22 % à 25 % des revenus).
Mais dans les pays sans accord de sécurité sociale (Émirats arabes unis, Indonésie, Panama), aucune couverture n’est prévue. Les indépendants doivent y souscrire des polices privées couvrant maladie, invalidité et retraite.
La dimension sociale du choix fiscal
La résidence fiscale idéale doit garantir une sécurité personnelle minimale. Une fiscalité faible mais sans couverture santé ni retraite peut convenir à un profil jeune et mobile, mais devient risquée avec l’âge ou les charges familiales.
Les pays scandinaves et d’Europe de l’Ouest, malgré une pression fiscale élevée, offrent une sécurité et une qualité de vie difficilement égalables. À l’inverse, les juridictions plus légères imposent aux expatriés une plus grande autonomie financière et administrative.
Ainsi, choisir son pays de résidence fiscale, c’est aussi choisir son modèle social : un compromis entre contribution et protection, entre liberté et sécurité.
8. Études de cas : profils de résidents, comparaisons chiffrées
Les stratégies de résidence fiscale internationale varient selon les profils : salarié expatrié, entrepreneur, retraité ou nomade numérique. Les exemples suivants illustrent les arbitrages concrets entre fiscalité, sécurité et qualité de vie.
Cas 1 — Le salarié qualifié : stabilité et fiscalité équilibrée
Profil : Anna, ingénieure allemande, souhaite s’installer en Irlande pour un poste dans la tech.
- Salaire annuel brut : 85 000 €
- Taux marginal d’imposition : 40 %
- Cotisations sociales : environ 15 %
- Revenu net annuel : 43 000 €
Bien que la fiscalité irlandaise soit modérée, Anna bénéficie d’un environnement dynamique, d’un marché du travail anglophone et de services publics performants. Elle profite aussi d’un régime d’imposition simplifié et de la possibilité d’investir dans des plans d’épargne non taxés sur les gains à long terme.
👉 Ce modèle illustre un équilibre entre compétitivité et stabilité : l’Irlande attire les salariés hautement qualifiés grâce à une fiscalité claire et prévisible.
Cas 2 — L’entrepreneur numérique : optimisation et mobilité
Profil : Julien, entrepreneur français, dirige une agence digitale depuis Tallinn (Estonie).
- Revenus professionnels : 120 000 €
- Taux d’imposition sur les bénéfices : 0 % tant que les bénéfices ne sont pas distribués.
- Cotisations sociales : 33 % sur la rémunération versée.
- Fiscalité sur dividendes : 20 % au moment du retrait.
Le régime estonien permet de capitaliser les profits dans l’entreprise sans impôt immédiat. L’administration est totalement dématérialisée, et l’e-résidence facilite la gestion à distance.
Cependant, Julien doit veiller à ne pas être requalifié résident fiscal français, car son centre d’intérêts économiques reste en France.
👉 L’Estonie illustre une fiscalité innovante, mais exige une discipline administrative stricte.
Cas 3 — Le retraité européen : attractivité et stabilité
Profil : Maria, retraitée italienne, s’installe au Portugal sous le régime RNH.
- Pension annuelle : 50 000 €
- Imposition : 10 % sur la pension étrangère (régime RNH 2024).
- Coût de la vie : environ 25 % inférieur à l’Italie.
Elle bénéficie d’une imposition réduite pendant dix ans et d’une couverture santé via les accords européens. Son pouvoir d’achat augmente sensiblement tout en profitant d’un climat doux et d’un cadre de vie stable.
👉 Le Portugal reste une destination privilégiée des retraités européens, malgré la réduction récente des avantages fiscaux.
Cas 4 — Le nomade numérique : flexibilité et risques
Profil : David, consultant britannique travaillant en ligne entre la Thaïlande et l’Espagne.
- Revenus annuels : 100 000 €
- Imposition : variable selon la durée de séjour ; risque de double résidence si 183 jours dépassés.
- Protection sociale : assurance privée (coût mensuel 300 €).
David profite d’un coût de la vie très faible en Asie mais d’une incertitude fiscale permanente. En Thaïlande, l’absence de convention fiscale avec le Royaume-Uni complique la déclaration de revenus.
👉 Le nomadisme numérique maximise la liberté géographique, mais crée une zone grise fiscale et sociale.
Cas 5 — L’investisseur international : recherche d’efficacité patrimoniale
Profil : Sofia, citoyenne belge, s’installe à Dubaï pour gérer un portefeuille immobilier.
- Revenus annuels : 250 000 €
- Imposition sur le revenu : 0 %
- Taxe foncière : inexistante
- Coût de la vie : élevé (loyer 4 000 € par mois)
Dubaï offre une fiscalité neutre et un environnement économique stable. Cependant, Sofia doit s’assurer de ne plus être considérée comme résidente belge. La Belgique impose encore les revenus immobiliers étrangers si le centre d’intérêts reste en Europe.
👉 Les juridictions à zéro impôt exigent une déconnexion totale du pays d’origine pour éviter les requalifications.
Synthèse chiffrée : comparaison de fiscalité moyenne (revenus annuels 100 000 €)
| Pays | Impôt + cotisations (%) | Revenu net estimé (€) | Qualité de vie (indice Mercer) |
|---|---|---|---|
| France | 48 % | 52 000 | 8/10 |
| Irlande | 40 % | 60 000 | 8,2/10 |
| Portugal (RNH) | 25 % | 75 000 | 8,5/10 |
| Estonie | 28 % | 72 000 | 7,5/10 |
| Suisse (Zurich) | 32 % | 68 000 | 9/10 |
| Émirats arabes unis | 0 % | 100 000 | 7/10 |
Cette comparaison montre qu’un taux faible ne garantit pas un meilleur cadre global. Les destinations les plus équilibrées combinent fiscalité maîtrisée, stabilité politique et qualité de vie.
9. Les pièges à éviter et les erreurs fréquentes
Le choix d’un pays de résidence fiscale ne se limite pas à signer un contrat de location ou à obtenir un visa. Les erreurs d’interprétation, d’anticipation ou de documentation sont fréquentes et peuvent coûter cher. Chaque année, des milliers d’expatriés se retrouvent dans des situations de double imposition ou de requalification fiscale.
L’erreur du faux départ : ne pas rompre les liens fiscaux avec son pays d’origine
Beaucoup pensent qu’il suffit de quitter leur pays pour cesser d’y être imposables. Or, la fiscalité repose sur la notion de lien économique et personnel.
Un contribuable reste résident fiscal de son pays d’origine tant qu’il y conserve :
- un logement disponible ;
- une activité professionnelle ou une société dirigée depuis le territoire ;
- sa famille ou son conjoint ;
- la majorité de ses revenus ou investissements.
Exemple concret : un entrepreneur français qui s’installe à Lisbonne sans fermer son entreprise à Paris risque une requalification comme résident fiscal français, même s’il passe moins de 183 jours par an en France.
👉 Le centre des intérêts économiques prime sur la simple présence physique.
La méconnaissance des conventions de non-double imposition
Nombreux sont ceux qui ignorent l’existence ou le contenu des conventions fiscales bilatérales. Or, ces accords déterminent quel pays a le droit d’imposer les revenus.
Une mauvaise interprétation peut entraîner une double taxation (chaque pays considérant le contribuable comme résident) ou, au contraire, une absence totale d’imposition qui peut être requalifiée ultérieurement.
Certains pays, comme le Portugal ou la Grèce, ont récemment restreint les exonérations des pensions étrangères, obligeant les résidents à réviser leurs plans fiscaux.
Le manque de cohérence administrative
Les administrations fiscales analysent la cohérence des informations :
- adresse déclarée ;
- lieu d’émission des factures ;
- comptes bancaires ;
- abonnements téléphoniques ou assurances ;
- utilisation de cartes bancaires.
Un résident fiscal déclaré à l’étranger mais dont 90 % des dépenses sont effectuées dans le pays d’origine attire immédiatement l’attention des autorités. Les échanges automatiques d’informations bancaires (norme CRS – Common Reporting Standard) facilitent désormais ces contrôles.
Le risque de requalification en cas de télétravail transfrontalier
Avec la généralisation du travail à distance, beaucoup de salariés conservent leur emploi dans un pays tout en travaillant depuis un autre.
Exemple : un salarié belge employé par une société luxembourgeoise qui télétravaille plus de 34 jours par an depuis son domicile devient partiellement imposable en Belgique.
Ignorer ces seuils conduit à des arriérés d’impôts et à des pénalités. Ces situations se multiplient avec la digitalisation du travail.
L’absence de planification patrimoniale et successorale
La fiscalité sur le patrimoine et les successions varie énormément selon les pays. Certains États n’imposent pas la transmission du patrimoine, tandis que d’autres appliquent des taux supérieurs à 40 % (France, Belgique).
Un changement de résidence doit donc s’accompagner d’une planification successorale : lieu des biens immobiliers, régime matrimonial, bénéficiaires des contrats d’assurance-vie, etc.
Les expatriés négligent souvent cet aspect, ce qui entraîne des divergences entre législations civiles et fiscales.
Le choix d’un pays sans considération de son système social
Certains choisissent un pays à fiscalité zéro, comme Dubaï ou les Bahamas, sans anticiper les coûts cachés : santé privée, retraite inexistante, scolarité coûteuse.
Ce modèle convient aux actifs jeunes et mobiles, mais devient problématique à long terme. Le retour dans un pays européen après plusieurs années sans cotisation sociale peut compliquer la réintégration.
Les erreurs de déclaration et les délais
Enfin, une erreur classique consiste à ne pas déclarer ses revenus mondiaux dans le pays de résidence, ou à le faire en retard.
Les sanctions peuvent être lourdes : amendes proportionnelles aux montants non déclarés, voire poursuites en cas de fraude intentionnelle.
Les délais de prescription varient : 3 ans en moyenne en Europe, mais jusqu’à 10 ans en cas de fraude présumée.
Le fil conducteur : cohérence, preuve et anticipation
La résidence fiscale repose sur trois piliers :
- Cohérence entre lieu de vie, activité et revenus.
- Preuve documentaire (contrats, factures, justificatifs).
- Anticipation des changements de situation (mariage, retraite, télétravail).
Une planification sérieuse et un accompagnement juridique spécialisé permettent d’éviter les erreurs coûteuses et de sécuriser durablement son statut fiscal.
10. Une grille de décision pour choisir votre pays de résidence fiscale
Déterminer son pays de résidence fiscale est un exercice d’équilibre. Il ne s’agit pas seulement de trouver l’endroit où l’impôt est le plus faible, mais celui où l’ensemble du cadre — fiscal, social, juridique et personnel — offre la meilleure cohérence. Une approche méthodique permet d’évaluer objectivement chaque destination avant toute décision.
Étape 1 — Identifier votre profil fiscal et personnel
Le choix du pays dépend d’abord de votre situation professionnelle, patrimoniale et familiale :
- Salarié expatrié : priorité à la stabilité juridique, aux conventions bilatérales et à la protection sociale.
- Entrepreneur : importance du régime fiscal des sociétés, de la fiscalité sur les dividendes et de la liberté administrative.
- Indépendant ou nomade numérique : nécessité de flexibilité, de faible coût de vie et d’accès facile aux visas.
- Retraité : recherche de sécurité, de santé publique et de fiscalité douce sur les pensions.
👉 Une première erreur consiste à comparer des régimes sans tenir compte du mode de vie et des besoins à long terme.
Étape 2 — Évaluer la fiscalité globale
Il est essentiel de ne pas se limiter à l’impôt sur le revenu. L’analyse doit inclure :
- les cotisations sociales (santé, retraite) ;
- l’imposition sur le patrimoine et les successions ;
- les impôts indirects (TVA, taxe foncière, charges locales) ;
- la fiscalité sur les dividendes, intérêts et plus-values.
Un pays comme la Suisse, par exemple, combine un taux d’imposition modéré (20 à 30 %) et une taxation faible du capital, tandis que la France, malgré une fiscalité plus lourde, offre un réseau de protection sociale dense.
Une comparaison utile consiste à calculer le taux effectif global : total des prélèvements / revenu brut. C’est cet indicateur qui mesure la pression réelle sur le contribuable.
Étape 3 — Vérifier les accords internationaux et la portabilité
Avant de s’établir dans un pays, il faut examiner :
- l’existence d’une convention de non-double imposition avec le pays d’origine ;
- les accords de sécurité sociale permettant de cumuler les années de cotisation ;
- la possibilité de transférer les droits à pension ou d’éviter la double affiliation.
Par exemple, un Français qui s’installe au Maroc bénéficie d’une convention fiscale claire, tandis qu’un départ vers un pays sans convention (Panama, Géorgie) entraîne souvent des incertitudes sur les revenus de source étrangère.
Étape 4 — Intégrer la stabilité politique et la qualité de vie
La fiscalité n’est qu’un levier parmi d’autres. Une résidence fiscale doit être durable.
Avant de s’engager, il faut analyser :
- la stabilité des institutions ;
- la sécurité personnelle et la criminalité ;
- la qualité du système de santé ;
- la facilité d’intégration culturelle et linguistique ;
- la connectivité (vols directs, télécommunications, internet).
Un pays fiscalement attractif mais isolé ou politiquement instable peut devenir contraignant à long terme. À l’inverse, des États comme le Portugal, les Pays-Bas ou le Canada offrent un cadre de vie sûr et cohérent avec une fiscalité claire.
Étape 5 — Anticiper la mobilité future
Beaucoup de résidents fiscaux changent de pays plusieurs fois dans leur vie. Or, chaque déplacement entraîne un nouveau risque de double imposition et des obligations administratives complexes.
Une planification efficace repose sur :
- la conservation des preuves de résidence (bail, factures, attestations) ;
- la déclaration correcte des revenus mondiaux ;
- la préparation d’une stratégie de sortie en cas de retour ou de relocalisation.
Les expatriés les plus expérimentés choisissent des pays disposant d’un réseau fiscal large — comme la France, le Royaume-Uni ou l’Espagne — facilitant la transition vers d’autres juridictions.
Étape 6 — S’entourer d’experts
Une erreur fréquente consiste à se fier aux forums ou à des conseils non vérifiés. Or, les implications fiscales et sociales d’un changement de résidence peuvent être lourdes.
Avant tout départ, il est conseillé de consulter :
- un conseiller fiscal international pour valider le statut et la conformité avec les conventions ;
- un notaire pour la planification patrimoniale et successorale ;
- un expert en mobilité internationale pour la protection sociale et la retraite.
Un accompagnement professionnel permet d’anticiper les points sensibles : transfert de société, imposition des revenus différés, changement de banque, couverture santé.
Étape 7 — Utiliser une méthode de pondération
Une grille de décision simple permet de comparer objectivement les pays selon cinq critères pondérés :
| Critère | Pondération (%) | Exemple d’évaluation |
|---|---|---|
| Fiscalité globale | 35 % | taux effectif, stabilité, transparence |
| Sécurité et stabilité politique | 20 % | absence de corruption, institutions solides |
| Qualité de vie et santé | 20 % | coût de la vie, système médical, sécurité |
| Cadre administratif | 15 % | simplicité, digitalisation, efficacité |
| Ouverture internationale | 10 % | accords bilatéraux, mobilité, accessibilité |
Chaque pays peut être noté sur 10 pour chaque critère, puis pondéré.
Par exemple, le Portugal ou les Pays-Bas obtiennent des scores élevés d’équilibre global, tandis que Dubaï ou Malte brillent sur la fiscalité mais moins sur la portabilité des droits.
Vers une approche rationnelle et durable
Choisir un pays fiscalement avantageux sans considérer ses implications sociales, juridiques et économiques revient à bâtir une stratégie sur du sable. La résidence fiscale optimale est celle qui concilie :
- une fiscalité soutenable et prévisible ;
- une sécurité institutionnelle solide ;
- un cadre de vie compatible avec ses projets personnels.
Ce n’est pas la faiblesse de l’impôt qui fait la qualité d’une résidence, mais sa cohérence avec la vie réelle du contribuable.
11. Vers une mobilité internationale durable — perspectives et évolutions
La mobilité fiscale internationale a longtemps été perçue comme une recherche d’optimisation ou d’évasion. Elle s’impose aujourd’hui comme une réalité structurelle du monde globalisé. Entrepreneurs, salariés à distance, retraités et investisseurs font désormais de leur résidence fiscale un élément central de leur stratégie de vie. Mais cette liberté nouvelle s’accompagne de responsabilités et de contraintes croissantes.
Une mobilité de plus en plus encadrée
L’époque des paradis fiscaux opaques touche à sa fin. Sous la pression du G20 et de l’OCDE, plus de 160 États participent désormais à l’échange automatique d’informations bancaires (Common Reporting Standard).
Les administrations fiscales savent désormais où résident les contribuables et où circulent leurs revenus. Cette transparence, renforcée par la directive européenne DAC 8, rend toute dissimulation presque impossible.
Ainsi, la mobilité fiscale ne peut plus s’envisager comme un contournement, mais comme une optimisation légale et transparente, fondée sur la conformité.
Les États eux-mêmes adaptent leurs politiques : certains, comme le Portugal ou Malte, limitent désormais leurs régimes spéciaux ; d’autres, comme l’Italie ou la Grèce, les consolident pour attirer les talents et les capitaux. L’équilibre entre attractivité et équité devient un enjeu majeur de la compétition fiscale mondiale.
L’émergence d’une fiscalité numérique et mobile
Le travail à distance et la digitalisation des revenus bouleversent la géographie fiscale. Un individu peut désormais produire de la valeur dans un pays, résider dans un autre et être rémunéré depuis un troisième.
Cette fragmentation pousse les institutions internationales à repenser les règles :
- L’OCDE développe le projet Pillar Two, qui impose un taux d’imposition minimum mondial de 15 % pour les grandes entreprises, bientôt élargi aux personnes à hauts revenus.
- L’Union européenne réfléchit à une harmonisation partielle pour les travailleurs numériques, afin de déterminer plus clairement la résidence fiscale dans un contexte de télétravail transfrontalier.
Ces évolutions marquent la fin des zones grises : la fiscalité de demain devra s’adapter à une économie mobile, mais rester équitable et traçable.
La recherche d’un nouvel équilibre entre liberté et protection
La mobilité fiscale n’est pas qu’une question de taux. C’est une quête d’équilibre entre liberté individuelle et sécurité collective.
Les pays les plus attractifs à long terme ne seront pas forcément les moins imposés, mais ceux capables d’offrir un cadre de vie stable, une gouvernance solide et une fiscalité prévisible.
Les individus, eux, doivent adopter une approche responsable : déclarer correctement leurs revenus, anticiper leur retraite, participer au financement des services publics du pays où ils vivent réellement.
L’avenir de la fiscalité internationale se jouera sur trois terrains : la transparence, la coopération et la portabilité des droits. L’objectif n’est plus d’échapper à l’impôt, mais de le rendre compatible avec un mode de vie transnational.
Vers une citoyenneté fiscale mondiale
La multiplication des accords de coopération transforme la fiscalité en un outil de régulation globale. Les contribuables les plus mobiles deviennent, en quelque sorte, des citoyens fiscaux du monde, naviguant entre systèmes mais soumis à des standards communs.
Cette évolution redéfinit la notion même d’appartenance : le pays de résidence fiscale n’est plus un simple lieu de déclaration, mais un espace de confiance et de participation économique.
Choisir son pays de résidence fiscale, c’est donc choisir un modèle de société, une vision de la stabilité et du progrès. Dans un monde où la mobilité devient la norme, la véritable optimisation n’est plus de payer le moins possible, mais de vivre et de travailler là où la fiscalité s’accorde avec ses valeurs, sa sécurité et sa qualité de vie.
Sources
- OCDE, Modèle de convention fiscale sur le revenu et sur la fortune (édition 2024).
- OCDE, Base Echange de Renseignements Automatique (Common Reporting Standard – CRS), mise à jour 2024.
- OCDE, Projet BEPS et Pilier Deux (2023–2024) : imposition minimale mondiale à 15 %.
- Union européenne, Directive 2011/16/UE et modifications successives (DAC 1 à DAC 8) sur la coopération administrative et l’échange automatique d’informations fiscales.
- Règlement (CE) n° 883/2004 et Règlement (CE) n° 987/2009 relatifs à la coordination des systèmes de sécurité sociale.
- Directive 2004/38/CE sur la libre circulation et le droit de séjour des citoyens européens.
- Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) – Article 45 : liberté de circulation des travailleurs.
- Code général des impôts (France) – Article 4 B : définition de la résidence fiscale.
- HM Revenue & Customs (Royaume-Uni) – Statutory Residence Test (HMRC Guidance, 2024).
- Agenzia delle Entrate (Italie) – Regime dei nuovi residenti, circulaire n° 17/E (2023).
- Autoridade Tributária e Aduaneira (Portugal) – Régime des Résidents Non-Habituels (RNH), 2024.
- Tax Agency (Espagne) – Loi Beckham (Real Decreto 687/2005, mise à jour 2023).
- Service Public fédéral Finances (Belgique) – conventions fiscales et statut des non-résidents.
- Federal Tax Administration (Suisse) – informations sur les impôts cantonaux et communaux.
- OCDE, Revenue Statistics in OECD Countries 2024 : taux marginaux et pression fiscale.
- Eurostat, Taxation Trends in the European Union 2024.
- European Commission, Economic Sentiment Indicator – ESI 2024.
- Transparency International, Corruption Perception Index 2024.
- *Mercer – Quality of Living Index 2024.
- *Numbeo – Cost of Living Index 2024.
- *Global Peace Index 2024 – Institute for Economics & Peace.
- European Labour Authority (ELA) – Labour Mobility in the EU – 2023 Annual Report.
- CLEISS (Centre des liaisons européennes et internationales de sécurité sociale) – fiches pays et formulaires A1/S1/U1.
- European Commission, Your Europe Portal – Fiches mobilité et résidence fiscale.
- European Parliamentary Research Service, Tax Barriers and Cross-Border Workers, 2023.
- Eurofound, Living, Working and COVID-19 Survey, 2023 : évolution du télétravail et mobilité numérique.
- Deloitte Global Mobility Tax Guide 2024.
- KPMG – Individual Income Tax Rates Table 2024.
- EY Worldwide Personal Tax and Immigration Guide 2024.
- PwC Global Mobility Services – Country Tax Summaries 2024.
- Expatistan / InterNations, Expat Insider Report 2024.
Retour sur le guide Fiscalités nomades et mobilité internationale
