La confiance dans l’IA : repenser le commandement futur. L’IA transforme la guerre. Comment la Défense peut-elle se préparer aux changements qui l’attendent ?
La réponse traditionnelle au défi de l’acceptation posé par l’utilisation militaire de l’IA a été d’insister sur le maintien par les humains d’un « contrôle humain significatif » comme moyen d’engendrer la confiance. Ce n’est plus une réponse adéquate si l’on considère l’omniprésence et les progrès rapides de l’IA et des technologies sous-jacentes connexes. L’IA jouera un rôle essentiel et croissant dans un large éventail d’activités de commandement et de contrôle (C2) dans tout le spectre des opérations. Bien qu’elle soit moins directement menaçante dans l’esprit du public que les « robots tueurs », l’utilisation de l’IA dans la prise de décision militaire présente des défis majeurs ainsi que d’énormes avantages. Le renforcement de la surveillance humaine sur la technologie elle-même n’empêchera pas une mauvaise utilisation par inadvertance (et encore moins intentionnelle).
Cet article part du principe que la confiance à tous les niveaux (opérateurs, commandants, dirigeants politiques et public) est essentielle à l’adoption efficace de l’IA pour la prise de décision militaire et explore les questions clés qui y sont liées. Qu’implique réellement la confiance dans l’IA ? Comment peut-on la construire et la maintenir pour soutenir la prise de décision militaire ? Quels changements sont nécessaires pour une relation symbiotique entre les opérateurs humains et les agents artificiels pour le commandement futur ?
On peut dire que la confiance dans l’IA existe lorsque les humains ont certaines attentes quant au comportement de l’IA sans référence à l’intentionnalité ou à la moralité de l’agent artificiel. Dans le même temps, cependant, la confiance n’est pas seulement fonction des performances et de la fiabilité de la technologie – elle ne peut être assurée uniquement en résolvant les questions d’intégrité et d’interprétabilité des données, aussi importantes soient-elles. L’instauration de la confiance dans l’IA militaire doit également tenir compte des changements nécessaires dans l’organisation militaire et les structures de commandement, la culture et le leadership. Atteindre un niveau de confiance global approprié nécessite une approche holistique. En plus de faire confiance à l’objectif pour lequel l’IA est utilisée, les commandants et opérateurs militaires doivent faire suffisamment confiance – et être suffisamment formés et expérimentés sur la façon de faire confiance – aux entrées, processus et sorties qui sous-tendent tout modèle d’IA particulier.
Cependant, la dimension la plus difficile, et sans doute la plus critique, est la confiance au niveau de l’écosystème organisationnel. Sans changement des éléments institutionnels de la prise de décision militaire, l’utilisation future de l’IA dans le C2 restera sous-optimale, confinée dans un cadre analogique. L’introduction efficace de toute nouvelle technologie, sans parler d’une technologie aussi transformationnelle que l’IA, nécessite de repenser fondamentalement l’organisation des activités humaines.
Donner la priorité aux dimensions humaines et institutionnelles ne signifie pas appliquer plus de contrôle sur la technologie ; il s’agit plutôt de réimaginer le rôle et la contribution de l’homme au sein du système cognitif homme-machine en évolution. Les futurs commandants devront être capables de diriger des équipes diverses au sein d’une véritable « force entière » qui intègre les contributions des sphères militaire, gouvernementale et civile. Ils devront comprendre suffisamment leurs coéquipiers artificiels pour être capables à la fois de collaborer avec eux et de les défier. Cela s’apparente davantage au murmure des étourneaux qu’au génie du leader individuel « martin-pêcheur ». Pour que de nouveaux concepts de commandement et de leadership se développent, la Défense doit repenser son approche non seulement de la formation et de la gestion des carrières, mais aussi des structures et processus décisionnels, notamment la taille, l’emplacement et la composition des futurs quartiers généraux.
L’IA transforme déjà la guerre et remet en question les habitudes humaines de longue date. En adoptant une plus grande expérimentation dans la formation et les exercices, et en explorant des modèles alternatifs pour le C2, la Défense peut mieux se préparer au changement inévitable qui s’annonce.
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